On ne le martèlera jamais assez, Berlin, c’est grand. Nous avons du élaguer à la serpe le programme ébauché avant le départ, laissant pour un prochain voyage toute la partie ouest (Charlottenburg, Tiergarten, Schöneberg), Postdam et le Sans-Souci, et les quartiers plus excentrés. Il est donc important de trouver un nid placé pas trop loin des lieux qui mettent en marche votre imaginaire. En ce qui nous concerne, nous avons opté pour Prenzlauerberg, ancien quartier de Berlin-Est, rénové (mais pas trop), tendance (juste ce qu’il faut), chaleureux et accueillant, dynamique et très tard éveillé la nuit.
Le Routard conseille dûment l’hôtel Kastanienhof (classique, bien situé, une salve de bons points pour le personnel qui se met en quatre pour la réussite de votre séjour et qui adore partager les expériences des visiteurs : écoutez-les raconter leurs souvenirs d’avant novembre 1989, ce qu’était leur vie quotidienne à l’Est, c’est à la fois passionnant et poignant). Le quartier regorge de petits cafés sympas, de restos cosy et simples, de loueurs de vélos pour vos balades, de lieux culturels : de nombreux bâtiments industriels, des fabriques, des imprimeries, sont transformés en ateliers, cinés, salle de concerts, foyers d’artistes. L’architecture du lieu est toujours respectée, mise en valeur mais dédiée désormais à une production moins matérialiste et standardisée.
Une visite à la Kulturbrauerei (ancienne brasserie devenu centre culturel) s’impose pour prendre le pouls rapide de Prenzlauerberg. On trouve aussi les programmes des bons plans musicaux, manifs, débats politiques, au café collectif Morgenrot, pas loin de l’hôtel, à côté d’une librairie anar. Café un peu militant, très végétarien, à l’ambiance conviviale et apaisante, zen attitude, éclairage doux à la bougie, vieilles tables en bois de récup, les règles de bonne conduite sont clairement affichées au-dessus du bar (excellentes bières bios, d’ailleurs, tout comme les muffins du jour et les gâteaux à la noisette) : ici, pas de propos sexistes, homophobes ou xénophobes, sinon, c’est la porte.
On retrouve cette atmosphère intime et sereine dans les petits restos (les chandelles, c’est bien, mais on s’arrache les yeux à déchiffrer les cartes en allemand). Il y a les valeurs sûres des guides : Metzer Eck, pour les audacieux qui iront se perdre dans la plus vieille auberge de Prenzlauerberg, certifiée conforme depuis 1913, plats exclusivement « germaniques », currywurst, escalope viennoise, soupe de pois, boulettes de viande, harengs, porc fumé… toujours garnis de pommes de terre/kartoffeln, of course. Quand il fait 2°, que le vent souffle et que vous avez marché toute la journée, ce genre de plat bien roboratif ne fait plus peur. Le lieu vaut surtout pour son ambiance, ses tables d’habitués, les petites salles en bois, avec poêle prussien, ses pintes de bière bien garnies et sa belle humeur.
Restauration 1900 est aussi recommandable, si vous cherchez un endroit moins brut de décoffrage : cuisine plus fine, plats locaux revus, travaillés et allégés, mais service épouvantablement lent…
Faites surtout confiance à votre flair, fermez vos guides, regardez les devantures, si les salles sont pleines de Berlinois à 22h et poussez les portes de lieux dont vous ignorez tout. Comme cette Osteria Fiorello, qui sentait la truffe, ou laissez-vous guider par les locaux, qui seront toujours de bons conseils : totalement perdus à 22h30 dans des rues mal éclairées, courant après un resto du Routard que nous étions incapables de localiser, deux étudiants bienveillants nous ont indiqué leur « cantine » du coin (un ami doux qui parle allemand, ça facilite les contacts), une épicerie italienne dotée de quelques tables pour goûter les pâtes du jour maison, accompagnées d’un Greco di Tufo à tomber. Je serai incapable de retrouver cet endroit dans ce dédale de ruelles mais parfois, le hasard fait bien les choses !