Le STAM a été notre dernier musée visité, ce qui fut une erreur. C’est par lui qu’il faut rencontrer la ville, car il retrace toute la métamorphose de cette cité des Flandres dans un lieu magnifique, une abbaye du XIIIème, dite de la Bijloke**. Le site, à l’époque en dehors de l’enceinte de la ville – risque de contagion oblige -, a abrité d’abord un simple hospice, puis dès 1250 un grand hôpital, complété quelques années plus tard par une chapelle, enfin par une importante abbaye cistercienne et son couvent. Seul le réfectoire, salle gothique à voûte de bois en berceau, ornée de peintures murales, et une partie du dortoir, ont échappé à la fureur calviniste (1577 – 1584) qui endommagea considérablement les bâtiments. Au fil des siècles, le lieu a bénéficié de reconstruction, de restauration, d’agrandissement, tout en gardant sa vocation caritative et médicale. La vétusté des locaux a sonné le glas de la poursuite des activités hospitalières en 1982, date à partir de laquelle, les murs de l’abbaye et du couvent se reconvertissent en lieux culturels (musées, salles de concert, expositions temporaires, ballets en résidence…).
Aujourd’hui, on entre dans le STAM par un bâtiment moderne tout en verre, qui jouxte une partie de l’ancien cloître intérieur du XVIIe ; on se promène alors, tout au long du circuit de l’exposition, dans les murs même de l’abbaye. Le musée accueille et organise des fonds dispersés, pour raconter l’histoire de Gand dans un parcours chronologique de six périodes :
– Les origines
– La métropole (1200 – 1600)
– Une époque paisible (1600 – 1800)
– La cité de l’industrie (1800 – 1950)
– Une ville en croissance (1950 – aujourd’hui)
– La ville de demain,
plus deux salles consacrées à des sujets qui dépassent la seule ville de Gand, comme Charles Quint, et le vol du panneau des Juges Intègres, volet du polyptique l’Agneau mystique des frères Van Eyck. Tout comme son comparse d’Anvers, le MAS, le STAM bénéficie de la muséographie du XXIe qui bannit le didactisme périmé, assistée des moyens numériques modernes, sur un site historique d’exception.
Nos salles préférées furent celles qui retracent l’apogée de Gand au Moyen Age, riche et puissante grâce à son industrie drapière florissante : plus de la moitié de la population travaille pour cette activité, favorisée par la situation géographique de la ville sur deux fleuves, qui la met aussi à l’abri des difficultés de ravitaillement. Gand deviendra même le passage obligé de toutes les importations en grains du comté de Flandre, la préservant de toute famine. Gand se veut, de part sa prospérité, une cité farouchement indépendante qui s’oppose souvent au pouvoir central des Comtes de Flandre, aux Ducs de Bourgogne puis aux Habsbourg. La mise en espace de ces salles, particulièrement inventive et bien aidée par le numérique, nous plongent vraiment dans l’atmosphère médiévale de Gand. Passer un peu de temps aussi dans la salle de Charles Quint rappelle qu’à la fureur des iconoclastes calvinistes répondit la violence des catholiques espagnols tout autant enragés : persécution, destruction, radicalisme, fanatisme… cette incapacité à accepter que d’autres pensent différemment n’est décidément pas d’aujourd’hui.
Avant de quitter l’exposition sur le développement urbain futur de Gand, poussez la porte de la Trésorerie de l’Hôtel de ville, déménagée et installée au STAM, salle magnifique tendue de cuir de Cordoue, avec lambris et cheminée baroque, qui nous ramène dans l’ambiance du XVIIème.
* Musée de la ville de Gand – quartier des Arts. Arrêt Verlorenkost sur la ligne 1 du tramway que l’on prend place Sint-Veerleplein / fermeture le lundi
** Bijloke = « endroit fermé » en néerlandais, fermé par la Lys