Révolutions Xenakis
Exposition rétrospective à la Cité de la Musique, sous la dir. de Mâkhi Xenakis et Mikos Solomos,
221, avenue Jean Jaurès, 75019 Paris, du 10 février au 26 juin 2022
Billet de Yann Chaptal
Rarement on aura vu une telle foultitude au vernissage d’une exposition, en l’occurrence celle qui vient d’être consacrée à un des Grands de la musique contemporaine, Iannis Xenakis (1922-2001), qui, de son vivant, n’a sans doute jamais connu une telle affluence. Il me souvient d’un concert, donné par les percussions de Strasbourg, – c’est vrai en plein été –, à la Faculté de Droit de la rue d’Assas, où nous ne devions pas être plus de dix dans l’amphithéâtre. « De la musique mathématique », vous a-t-on dit, « y a pas de “mélodies” retenables », mais depuis, disons en raccourci, Stravinsky, y en a-t-il de retenables ?, sauf qu’après les deux ou trois premières mesures, une oreille un peu aiguisée reconnaît tout de suite le “style” Xenakis.
Disons donc plutôt “musique architecturée”, car musique et architecture, telles ont été, outre la mythologie grecque pour la thématique, les deux/trois orientations de prédilection du compositeur, et sont la/les clés de son œuvre, et d’une œuvre qui ne cessera d’être productive. Les documents, soigneusement présentés dans leur ordre chronologique par sa fille, Mâkhi Xenakis, artiste plasticienne, sont là pour en rappeler la genèse, de Metastasis (1954) à, comme par hasard, « Oméga » (1997), en passant par… ce que vous découvrirez sur place. Il a peu souvent eu recours à la voix humaine, à laquelle il semble avoir préféré celle des moutons de Crète (qui résistent depuis la préhistoire, et dirait Xenakis, même au-delà), mais s’est ingénié à expérimenter tous les instruments classiques à la limite de leurs possibilités techniques. Saluons à cette occasion la présentation faite de ses partitions, qui sont, à elles seules, quoique « mathématiques », de véritables œuvres graphiques.
On regrettera seulement que, pour un créateur qui ne concevait, architecturalement comme musicalement, que des espaces éclatés, ne lui ait été accordé en ce lieu magistral qu’un espace aussi réduit, un étroit couloir à sens unique, même si giratoire.